Étude KPMG
Déclin du réseau de concessionnaires : beaucoup de bruit pour rien
9 janvier 2018 upsa-agvs.ch – « Les concessionnaires automobiles risquent le massacre ! » : une étude signée KPMG, le cabinet de conseil aux entreprises, et même pas évaluée superficiellement, devrait faire l’objet de gros titres accrocheurs du Blick. Un examen détaillé de l’étude vaudrait pourtant la peine. Elle montre en effet comment les dirigeants des constructeurs, des fournisseurs et des concessionnaires évaluent le marché du futur.
kro. Les consultants de KPMG, le cabinet international d’audit et de conseil aux entreprises, analysent chaque année le moral de la branche automobile sur la base d’une enquête menée dans le monde entier auprès de près de 1000 cadres dirigeants du secteur. L’étude a été publiée le 5 janvier. Les médias se sont essentiellement focalisés sur l’un de ses aspects, à savoir le déclin du réseau de concessions auquel s’attendent les personnes interrogées. Ils en ont tiré un gros titre selon lequel la fin de la branche est imminente : « Mettez vos ceintures : les concessionnaires automobiles s’attendent à des coupes sombres dans leur branche, et ce, très bientôt. »
Les personnes interrogées ont des attentes différentes
L’étude KPMG en ligne fait toutefois état de la différenciation nécessaire. Il eut suffi que les médias s’y intéressent et qu’ils y consacrent quelques minutes. Le gros titre criard n’aurait alors certainement plus trouvé aucune légitimité.
Il convient d’abord de relativiser le résultat sur la seule base de la configuration de l’enquête : des représentants de constructeurs (242), de fournisseurs (201), d’entreprises technologiques (156), de prestataires de mobilité (91), de concessionnaires (82), d’établissements financiers (49), de fournisseurs d’énergie et de gestionnaires d’infrastructures (44) ainsi que d’autorités publiques (42) en Europe de l’Ouest et de l’Est, en Inde, en Chine et en Amérique du Nord et du Sud ont été interrogés. Ils expriment naturellement tous des attentes très différentes à l’égard de l’avenir, marquées tant par leur spécialisation que par leur origine régionale.
Chinois et Européens ne perçoivent pas le marché de la même manière
Les cadres chinois, dont le marché automobile vient à peine de se réveiller, observent, à juste titre, l’évolution selon une perspective plus progressive que leurs confrères des marchés saturés d’Europe occidentale et des États-Unis. Et les représentants des constructeurs envisagent l’évolution sous un angle différent de celui des concessionnaires du fait de leur agenda. Si les constructeurs prévoient de vendre à l’avenir davantage de voitures directement en ligne, ils estiment que l’impact sur le nombre de concessionnaires est inégalement plus important que lorsque les concessionnaires partent du principe, compréhensible, qu’ils continueront de vendre les véhicules dans le futur.
Le diable se dissimule dans l’interprétation
Plus l’examen de l’étude est poussé, plus il est clair que le gros titre « Plus de la moitié des quelque 1000 cadres dirigeants interrogés dans le monde s’attendent à une baisse du nombre de concessionnaires pouvant atteindre 50 % d’ici 2025 » ne correspond que partiellement à la réalité. En réalité, ce sont 95 % d’entre eux qui estiment que le nombre de concessionnaires pourrait être réduit de jusqu’à 50 %. Cela s’explique par le fait qu’en moyenne, à peine 5 % des personnes interrogées pensent explicitement que le nombre de concessionnaires n’évoluera pas. Le diable se dissimule dans l’interprétation : seuls 10 % des sondés ont estimé qu’une variation pouvant atteindre 50 % serait réaliste. En rassemblant les voix selon lesquelles une variation de 10, 20, 30, 40 et 50 % serait probable, il va de soi qu’une majorité nette se dégage (voir le tableau ci-dessous).
Il serait cependant tout autant possible de réunir les voix qui croient à une variation de jusqu’à 10, 20 ou 30 % et celles qui ne s’attendent à aucune variation. Le lecteur serait tenté de croire, à juste titre, que 75 % des sondés estiment qu’il est probable que le nombre de concessionnaires reculera à peine ou qu’il baissera d’un tiers au maximum. Ce gros titre en serait immédiatement moins croustillant.
(Exemple de lecture : 10 % des représentants de constructeurs interrogés ont indiqué qu’ils s’attendaient à un déclin du réseau de concessionnaires pouvant atteindre 50 % d’ici 2025.)
Le nombre de réponses relativise par ailleurs la déclaration : 10 % des représentants de constructeurs qui affirment que le réseau de concessionnaires enregistrera un déclin de 50 % d’ici 2025 correspondent à 24 personnes. 21 personnes du même cercle pensent toutefois que le nombre de concessionnaires restera inchangé. Qu’il s’agisse de 24 personnes ou de 21 personnes, la déclaration ne revêt aucun caractère représentatif.
Les concessionnaires se montrent plus pessimistes que les constructeurs
Il est néanmoins remarquable que les concessionnaires interrogés lors de l’enquête évaluent leur situation future avec bien plus de pessimisme que les constructeurs : alors que 9 % des constructeurs sont d’avis que le nombre de concessions ne changera pas, seuls 5 % des concessionnaires le partagent. Même les entreprises technologiques agressives estiment que la situation future des concessionnaires est plus radieuse que ces derniers ne l’envisagent eux-mêmes. Il y a là matière à réflexion...
9 janvier 2018 upsa-agvs.ch – La direction de l’UPSA à Berne s’est particulièrement énervée au sujet de l’article « bâclé ». Suite à des récits manquant de sérieux sur la branche automobile il y a quelques semaines, la profession est confrontée une fois de plus à un nouvel article de cet acabit.
M. Wernli, qu’est-ce qui vous est passé par la tête lorsque vous avez vu le gros titre « Les concessionnaires automobiles risquent le massacre » juste avant le week-end ?
Urs Wernli : Je me suis énervé sans modération.
Le récit ne correspond pas à la réalité ?
L’évolution future de la branche automobile est une chose, travailler avec sérieux en est une autre. Si le journaliste s’était donné la peine de se pencher sur l’étude pendant quelques minutes, il se serait bien gardé de publier un gros titre aussi brutal. Rendre public quelque chose de ce type sans le commenter s’apparente ni plus ni moins à un coup de poing dans la figure de toute la branche. Cela ne fait qu’attiser la confusion et la peur. J’estime que c’est tout à fait irresponsable.
Personne ne conteste toutefois que le réseau de concessionnaires connaîtra des changements...
C’est inévitable, notamment au vu de l’évolution continuelle qui mène à des points de vente plus grands. D’un autre côté, la population ne cesse de croître et le nombre de deuxièmes voitures augmente lui aussi. Dans ces conditions, le nombre de voitures vendues ne diminuera certainement pas dans un futur proche.
La voiture comme signe extérieur de richesse continuera de perdre de son prestige, n’est-ce pas ?
Fatalement. L’étude le montre aussi. 55 % des sondés seraient manifestement prêts à renoncer à leur propre véhicule si des modalités de partage plus nombreuses et plus performantes se faisaient jour. C’est pourquoi il est totalement disproportionné de tout remettre en question ici et de broyer du noir. Et n’oublions pas que des véhicules utilisés par plusieurs personnes sont davantage sollicités, ce qui engendre directement des besoins accrus de maintenance.
kro. Les consultants de KPMG, le cabinet international d’audit et de conseil aux entreprises, analysent chaque année le moral de la branche automobile sur la base d’une enquête menée dans le monde entier auprès de près de 1000 cadres dirigeants du secteur. L’étude a été publiée le 5 janvier. Les médias se sont essentiellement focalisés sur l’un de ses aspects, à savoir le déclin du réseau de concessions auquel s’attendent les personnes interrogées. Ils en ont tiré un gros titre selon lequel la fin de la branche est imminente : « Mettez vos ceintures : les concessionnaires automobiles s’attendent à des coupes sombres dans leur branche, et ce, très bientôt. »
Les personnes interrogées ont des attentes différentes
L’étude KPMG en ligne fait toutefois état de la différenciation nécessaire. Il eut suffi que les médias s’y intéressent et qu’ils y consacrent quelques minutes. Le gros titre criard n’aurait alors certainement plus trouvé aucune légitimité.
Il convient d’abord de relativiser le résultat sur la seule base de la configuration de l’enquête : des représentants de constructeurs (242), de fournisseurs (201), d’entreprises technologiques (156), de prestataires de mobilité (91), de concessionnaires (82), d’établissements financiers (49), de fournisseurs d’énergie et de gestionnaires d’infrastructures (44) ainsi que d’autorités publiques (42) en Europe de l’Ouest et de l’Est, en Inde, en Chine et en Amérique du Nord et du Sud ont été interrogés. Ils expriment naturellement tous des attentes très différentes à l’égard de l’avenir, marquées tant par leur spécialisation que par leur origine régionale.
Chinois et Européens ne perçoivent pas le marché de la même manière
Les cadres chinois, dont le marché automobile vient à peine de se réveiller, observent, à juste titre, l’évolution selon une perspective plus progressive que leurs confrères des marchés saturés d’Europe occidentale et des États-Unis. Et les représentants des constructeurs envisagent l’évolution sous un angle différent de celui des concessionnaires du fait de leur agenda. Si les constructeurs prévoient de vendre à l’avenir davantage de voitures directement en ligne, ils estiment que l’impact sur le nombre de concessionnaires est inégalement plus important que lorsque les concessionnaires partent du principe, compréhensible, qu’ils continueront de vendre les véhicules dans le futur.
Le diable se dissimule dans l’interprétation
Plus l’examen de l’étude est poussé, plus il est clair que le gros titre « Plus de la moitié des quelque 1000 cadres dirigeants interrogés dans le monde s’attendent à une baisse du nombre de concessionnaires pouvant atteindre 50 % d’ici 2025 » ne correspond que partiellement à la réalité. En réalité, ce sont 95 % d’entre eux qui estiment que le nombre de concessionnaires pourrait être réduit de jusqu’à 50 %. Cela s’explique par le fait qu’en moyenne, à peine 5 % des personnes interrogées pensent explicitement que le nombre de concessionnaires n’évoluera pas. Le diable se dissimule dans l’interprétation : seuls 10 % des sondés ont estimé qu’une variation pouvant atteindre 50 % serait réaliste. En rassemblant les voix selon lesquelles une variation de 10, 20, 30, 40 et 50 % serait probable, il va de soi qu’une majorité nette se dégage (voir le tableau ci-dessous).
Il serait cependant tout autant possible de réunir les voix qui croient à une variation de jusqu’à 10, 20 ou 30 % et celles qui ne s’attendent à aucune variation. Le lecteur serait tenté de croire, à juste titre, que 75 % des sondés estiment qu’il est probable que le nombre de concessionnaires reculera à peine ou qu’il baissera d’un tiers au maximum. Ce gros titre en serait immédiatement moins croustillant.
Attente d’un déclin du réseau de concessionnaires | ||||||
50 % | 40 % | 30 % | 20 % | 10 % | reste inchangé | |
Constructeurs | 10 % | 8 % | 30 % | 34 % | 9 % | 9 % |
Fournisseurs | 9 % | 10 % | 32 % | 31 % | 12 % | 4 % |
Entreprises technologiques | 16 % | 18 % | 31 % | 21 % | 8 % | 8 % |
Prestataires de mobilité | 15 % | 14 % | 41 % | 19 % | 9 % | 2 % |
Concessionnaires | 9 % | 18 % | 21 % | 37 % | 11 % | 5 % |
Gouvernements | 5 % | 14 % | 45 % | 26 % | 7 % | 2 % |
Moyenne | 10 % | 13 % | 33 % | 28 % | 9 % | 5 % |
(Exemple de lecture : 10 % des représentants de constructeurs interrogés ont indiqué qu’ils s’attendaient à un déclin du réseau de concessionnaires pouvant atteindre 50 % d’ici 2025.)
Le nombre de réponses relativise par ailleurs la déclaration : 10 % des représentants de constructeurs qui affirment que le réseau de concessionnaires enregistrera un déclin de 50 % d’ici 2025 correspondent à 24 personnes. 21 personnes du même cercle pensent toutefois que le nombre de concessionnaires restera inchangé. Qu’il s’agisse de 24 personnes ou de 21 personnes, la déclaration ne revêt aucun caractère représentatif.
Les concessionnaires se montrent plus pessimistes que les constructeurs
Il est néanmoins remarquable que les concessionnaires interrogés lors de l’enquête évaluent leur situation future avec bien plus de pessimisme que les constructeurs : alors que 9 % des constructeurs sont d’avis que le nombre de concessions ne changera pas, seuls 5 % des concessionnaires le partagent. Même les entreprises technologiques agressives estiment que la situation future des concessionnaires est plus radieuse que ces derniers ne l’envisagent eux-mêmes. Il y a là matière à réflexion...
« Je me suis énervé sans modération »
9 janvier 2018 upsa-agvs.ch – La direction de l’UPSA à Berne s’est particulièrement énervée au sujet de l’article « bâclé ». Suite à des récits manquant de sérieux sur la branche automobile il y a quelques semaines, la profession est confrontée une fois de plus à un nouvel article de cet acabit.
M. Wernli, qu’est-ce qui vous est passé par la tête lorsque vous avez vu le gros titre « Les concessionnaires automobiles risquent le massacre » juste avant le week-end ?
Urs Wernli : Je me suis énervé sans modération.
Le récit ne correspond pas à la réalité ?
L’évolution future de la branche automobile est une chose, travailler avec sérieux en est une autre. Si le journaliste s’était donné la peine de se pencher sur l’étude pendant quelques minutes, il se serait bien gardé de publier un gros titre aussi brutal. Rendre public quelque chose de ce type sans le commenter s’apparente ni plus ni moins à un coup de poing dans la figure de toute la branche. Cela ne fait qu’attiser la confusion et la peur. J’estime que c’est tout à fait irresponsable.
Personne ne conteste toutefois que le réseau de concessionnaires connaîtra des changements...
C’est inévitable, notamment au vu de l’évolution continuelle qui mène à des points de vente plus grands. D’un autre côté, la population ne cesse de croître et le nombre de deuxièmes voitures augmente lui aussi. Dans ces conditions, le nombre de voitures vendues ne diminuera certainement pas dans un futur proche.
La voiture comme signe extérieur de richesse continuera de perdre de son prestige, n’est-ce pas ?
Fatalement. L’étude le montre aussi. 55 % des sondés seraient manifestement prêts à renoncer à leur propre véhicule si des modalités de partage plus nombreuses et plus performantes se faisaient jour. C’est pourquoi il est totalement disproportionné de tout remettre en question ici et de broyer du noir. Et n’oublions pas que des véhicules utilisés par plusieurs personnes sont davantage sollicités, ce qui engendre directement des besoins accrus de maintenance.